Y   A   P A S   D E   J U S T I C E ! 12-02

par Brigitte Verdière


Y a pas de justice! Vous le saviez déjà, moi aussi, mais quand même cela continue de m’énerver tous ces La justice écope gens bafoués, opprimés, réduits en esclavage, les passe-droits et les non-droits. La Cour pénale internationale a été instaurée, mais à quel prix! Celui de telles contorsions diplomatiques que les plus grands auteurs d’injustices dans le monde, les États-Unis, ont réussi à y soustraire une partie de leurs troupes.

Si vous voulez mon avis, cette cour-là est mal partie. Et pourtant, elle en a suscité des espoirs. Les groupes de femmes ne peuvent en effet que se réjouir de l’accent mis lors de la rédaction du traité qui reconnaît les crimes commis sur une base sexuelle et la violence spécifique que vivent les femmes lors des conflits. Cette recommandation est incluse dans la résolution 1325 d’octobre 2000 du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui y ajoute la nécessité d’inclure les femmes à tous les niveaux des négociations de paix et de résolution des conflits. Rien qu’avec cela, la Cour a du travail pour des années !

Et d’autres crimes devraient être jugés. LM Handrahan estimait ainsi, dans un article publié par la Tribune des droits humains, qu’un des premiers cas que cette cour devrait considérer est l’apartheid dont sont victimes les Saoudiennes. L’absence de liberté de mouvement, d’expression, d’association, les violences qu’elles subissent, l’impossibilité de bénéficier d’un sytème de justice juste constituent, selon lui, un crime contre l’humanité.

Quant au tribunal de la Haye, il continue son travail. Les viols et violences envers les femmes restent, hélas, à son ordre du jour. Dernière arrestation en date : celle du serbe de Bosnie, Radovan Stankovic, arrêté le 10 juillet 2002, accusé de viols systématiques de femmes musulmanes commis entre le 2 août et le 30 octobre 1992. L’homme tenait une maison qu'il "gérait comme un bordel", selon l'acte d'accusation du procureur, où au moins neuf femmes et jeunes filles auraient été détenues. "Outre les viols et autres violences sexuelles, toutes les détenues devaient travailler pour les soldats serbes, laver leurs uniformes, faire la cuisine et nettoyer la maison" stipule le procureur.

Une Saoudienne et son enfant Les cours nationales sont elles aussi sollicitées. C’est pour que soient jugés les coupables de génocide envers 200.000 autochtones du Guatemala que la prix Nobel de la paix guatémaltèque Rigoberta Menchú a intenté un procès en décembre 1999 en Espagne. La Haute Cour d'Espagne a refusé d’examiner la plainte, estimant les tribunaux guatémaltèques compétents... et libres d’intimidation! Certaines plaintes vont toutefois être examinées par des tribunaux locaux.

Il existe de nombreux instruments internationaux dont on peut se prévaloir pour défendre les droits des femmes. Ce sont souvent des textes pleins de beaux principes. Des textes toutefois conclus difficilement afin que soient proclamés noir sur blanc des droits élémentaires : pour la liberté d’expression, d’association, pour le droit de se défendre. Le droit d’exister. Quel qu’en soit le prix.

C’est ainsi que des étudiantes libériennes ont, en 2001, payé de sévices à répétition leur participation à une manifestation pacifique sur leur campus universitaire. Les responsables : les forces de police qui les ont arrêtées. En Tunisie, les militant-es des droits humains sont arrêtés. En Éthiopie, les juristes de l’Ethiopian Women Lawyers Association ont vu, en 2001, leurs activités suspendues par le pouvoir parce qu’elles critiquaient le ministère de la Justice pour son inaction dans la lutte contre les violences envers les femmes, révélait Human Rights Watch.

Et je pourrais continuer ainsi longtemps. L’information ne manque pas en la matière. Reste une certitude : il n’y a pas de naïveté à réclamer la mise en oeuvre d’une loi et son application. Toute victoire dans le domaine est une victoire générale. À voir la façon dont les représentants des pays s’étripent pour choisir le mot qui sera adopté dans un texte plutôt qu’un autre, on se rend compte du poids des mots. À voir les pays qui, par la suite, ratifient ou non ces mêmes textes, on se doute qu’il y a là un enjeu majeur. Et il l’est. Tout comme la condamnation, même seulement morale, même posthume, d'auteurs de crimes contre l'humanité.




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Édition Web et mise en ligne : Nicole Nepton